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Fidèles à leur tradition qui met à la disposition des lecteurs des textes rares venus du monde entier, les éditions Po&psy publient en 2025 un recueil de poèmes de la tradition chinoise traduits par Ghillem Fabre. J’ai choisi de vous présenter deux poètes de l’anthologie, dont les textes appartiennent à un genre particulier : la poésie chantée nommée « ci » ((chinois simplifié 词, chinois traditionnel 詞, pinyin cí, Wade-Giles tz’u, EFEO ts’eu).

Il s’agit d’une forme caractéristique de la dynastie Song (11ème siècle) : écrit sur une mélodie préexistante, il se distingue du poème régulier, shi, des Tang (dynastie précédente). Si les vers sont de longueur irrégulière, la mélodie impose néanmoins des règles strictes : nombre de couplets, disposition des rimes et des tons, etc. Les influences musicales étrangères, venues à travers l’Asie centrale (les airs barbares) et des chansons populaires du sud (les « airs des hameaux et venelles). depuis les Tang, ont imprimé leur marque sur les mélodies, dont il ne reste, hélas aucune, qui servaient de structure aux ci. Il existait 870 mélodies, et 1670 modèles prosodiques en tenant compte des variantes sur certaines mélodies. Les poèmes avaient pour titre le nom de la mélodie.

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Su Dongpo (1037-1101) ,

en Chine plus souvent appelé 苏轼 SU SHI, Su Dongpo était un homme politique et un lettré, calligraphe et peintre de la dynastie SONG.
Sa très riche oeuvre poétique en fait une figure éminente de la poésie chinoise – ses oeuvres font l’objet de nombreux commentaires au fil des siècles.

Sur l’air « La ville au bord du fleuve »

                   Souvenir d’un rêve, dans la nuit du 20e jour du premier mois de l’année, yi mao (1075)

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.Dix ans déjà que la mort nous sépare une immensité noire

Je n’ai pas réfléchi mais n’ai pu oublier

Ta tombe solitaire à mille lieues d’ici

Et nulle part où parler de ma peine

À présent si nous nous retrouvions nous ne saurions nous reconnaître

Ton visage s’est couvert de poussière et mes cheveux de givre

Cette nuit j’ai rêvé que j’étais de retour au pays

À la fenêtre de ta chambrette tu te peignais te maquillais

Nous nous regardions sans un mot

Seuls coulaient des flots de larmes

Je vois déjà le lieu année après année où se brise mon cœur

Ta tombe au clair de lune le tertre de jeunes pins

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江城子·乙卯正月二十日夜记梦

苏轼〔宋代〕

十年生死两茫茫,不思量,自难忘。
千里孤坟,无处话凄凉。
纵使相逢应不识,尘满面,鬓如霜。

夜来幽梦忽还乡,小轩窗,正梳妆。
相顾无言,惟有泪千行。
料得年年肠断处,明月夜,短松冈。

https://www.bilibili.com/opus/727154361568854064 (déclamation + musique)

https://baike.baidu.com/item/%E8%8B%8F%E8%BD%BC/53906 (sur l’auteur)

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Su Shi, vieil arbre et rocher étrange, in Fu Sinian, ed., Zhongguo meishu quanji huihua

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Xin Qiji (1140-1207) 辛棄疾

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poète (629 poèmes connus), calligraphe et militaire de la dynastie Song, ses vers chantés (ci) sont estimés à l’égal de ceux de SU Dongpo. Ses poèmes présentent un large éventail de sujets. Il existe également des poèmes sur les paysages pastoraux, la vie rurale et d’autres sujets, révélant son amour pour les paysages pastoraux et la vie rurale. .

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Sur l’air « La laideur de l’esclave »

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Jeune je ne connaissais pas le goût de la tristesse

J’aimais monter jusqu’au dernier étage

J’aimais monter jusqu’au dernier étage

Pour composer des poèmes chantés me forçais à parler de tristesse

À présent j’ai touché le fond de la tristesse

Etje voudrais parler mais rien ne sort de moi

Je voudrais parler mais rien ne sort de moi

Si ce n’est : « Quel automne glacé ! »

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丑奴儿·书博山道中壁

辛弃疾(宋代)

少年不识愁滋味,爱上层楼。
爱上层楼,为赋新词强说愁。

而今识尽愁滋味,欲说还休。
欲说还休,却道“天凉好个秋”!

https://baike.baidu.com/item/%E5%A4%A9%E5%87%89%E5%A5%BD%E4%B8%AA%E7%A7%8B/4052  (explication, interprétation)

https://baike.baidu.com/item/%E5%A4%A9%E5%87%89%E5%A5%BD%E4%B8%AA%E7%A7%8B/4052  (déclamation)

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Xin Qiji, calligraphie du Qu Guo Ti