photo de couverture : encre et aquarelle, Josette Digonnet
.
L’instant se fige
instant Noailles
il suffit d’une voix
suspendue à un fil
un souffle à peine
et tout est compromis
.
La légéreté des arbres
leur frémissement tranquille
leur beauté enveloppante
.
Le regard se fond
entre les feuilles
cherche le ciel
se perd dans un lacis de palmes
frémissantes
s’arrime au passage
à un entrelacs de ramilles
un fourmillement de nervures
un enchevêtrement de troncs et de lianes
.
la vie est là pareille
à ce dessin de lignes inextricables
cet écheveau de voussures et de canopées
treillis et tissages où se mêlent les verts
et soudain tout se fige
le temps prend la couleur monochrome
de la voix qui tâtonne
sur son lit d’hôpital
.
Est-ce la même
cette voix qui hésite
griffe l’air de ses à-coups
de ses hésitations
de ses accrocs ?
.
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Le temps Noailles n’est plus
qui a fait place à d’autres jours
d’autres vivants
pour remplacer les vivants d’autrefois
racines qui plongent
dans les ramifications de la terre
invisibles et fortes
suffisamment
pour élancer
vers le ciel
la verticalité des branches
.
Elle écoute le vent
les rumeurs assourdies
de la ville s’y mêlent
elle lit des poèmes
pour se réconforter
ne pas se laisser distraire
.
Elle pense à elle
elle la panse
ses mots silencieux iront-ils jusqu’à elle
irradieront-ils de sève vive
son corps absenté
.
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Angèle Paoli est née à Bastia et vit actuellement dans un village du Cap Corse, d’où elle anime la revue numérique de poésie & de critique Terres de femmes, créée en 2004 avec son mari Yves Thomas, récemment disparu. Prix européen de la critique poétique francophone, Aristote 2013. Angèle Paoli a publié une vingtaine d’ouvrages et de traductions. Les plus récents :
.Lauzes, peintures de Guy-Paul Chauder, Éditions Al Manar (juin 2021)
Traverses, Les Lieux-Dits, Cahiers du Loup bleu, 2021
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On la retrouve sur https://terresdefemmes.blogs.com/