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On pourrait être surpris de trouver Judas dans l’émoi du Jeudi – mais c’est que ce Judas, qui revendique sa trahison comme plus haute fidélité, nous parle de l’essentiel.
Sa trahison, telle que la conçoit Alain Nouvel, dénonce la médiocrité, le paraître, le mercantile, les mensonges offusquant le coeur de ce qui devrait être, de ce qui donne à la vie son sens le plus haut : être – n’être que – « école de joie » et de partage.
C’est un renversement du regard qu’il nous est proposé d’adopter, un regard nettoyé des préjugés, un regard neuf, qui ne se laisse pas tromper par les discours sur l’ombre et la lumière, le bien ou le mal, mais qui soit lucide – et courageux :
Soyons ce Judas bienfaisant, retrouvons le haut sens de la vie. Que cette nouvelle année, naissant dans le chaos, soit celle aussi des retrouvailles avec le meilleur de nous-mêmes, pour un monde meilleur.
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JUDAS
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Tous ceux qui croient savoir et qui savent nommer
Tous leurs discours savants c’est fou ce qu’ils m’agacent
Je m’appelle Judas et je sais traverser
Les frontières du sens et de la convenance
Je suis Traitre majeur
Celui qui a dit « Non » au cercle des apôtres
Et qui a préféré finir seul et banni
Parce que nommer c’est poser des frontières
Je suis sublime-abject restant entier
Sans rien qui couperait mon être de sa lame
Le Bien le Mal et leurs limites majuscules
Je n’en connais ni le sens ni l’ennui
Je danse sur les fils des limites extrêmes
Et mes pieds les recouvre de poussière rieuse
Et mon rire transgresse mon silence le suit
Non je n’ai pas trahi pour ces quinze deniers
Que les hommes du Dogme ont voulu insinuer
J’ai trahi pour Jésus, son école de joie
Qu’elle reste légère et libre et qu’elle accueille
Celui qui croit en Dieu, celui qui n’y croit pas
Celui qui vit en paix celui qui vit en guerre
Celui qui vit en rire celui qui vit en pleurs
Et je suis le treizième et je suis le premier
Le seul à rester seul, aussi seul que mon Maître.
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