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Viviane Ciampi (Italie) – Claude Bugeia – Flore Iborra – Pierre Rosin – Brigitte Broc – Gilles Compagnon – Sandrine Davin (illustration numérique, à partir de l’oeuvre de Dominique Penez) -Max Mazzoli (Italie/Angleterre) -Yin Xiaoyuan (Chine – photos)
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Viviane Ciampi
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C’È QUALCUNO
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C’è qualcuno dentro di me
chiuso dentro là dentro da tempo
sembra che respiri infatti respira
lo sento muovere in certe ore
quando dormo sogna al posto mio
fa le mie veci con la mia voce
mi rischiara le nuvole o le annerisce
ieri ha sognato che potevo cambiare pelle ringiovanire
quando si è svegliato
mi sono svegliata non più quella del sogno
c’è qualcuno dentro di me uno sconosciuto
che risponde alle mie domande
anche a quelle che non gli pongo
e anche a quelle che non mi pongo
ma non mi dà vere soluzioni
mi propone opzioni
a volte ride mi chiedo perché
c’è qualcosa da ridere?
ma poi divento allegra mi chiedo perché
se guido vuol guidare al posto mio
mi preme il piede sull’acceleratore
mi ha fermato la polizia (favorisca i documenti!)
ho detto è stato lui
non mi hanno creduta
mi sono accorta che lui è un cannibale
si nutre del mio dolore
vuole che fabbrichi dolore
io non gli do retta
ma il dolore arriva e lui mangia mangia mangia
giovedì ha avuto un orgasmo durato tre minuti
è stato fantastico e un po’ imbarazzante
sembrava potesse uscire dalla mia bocca
mi chiede di abbracciarlo ma non posso
è dentro di me
porta con sé un orologio enorme
che fa un rumore noioso
credo che andrà avanti
fino alla fine – la sua e la mia –
col suo tic-tac tic-tac tic-tac
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IL Y A QUELQU’UN
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Il y a quelqu’un à l’intérieur de moi
renfermé dedans là-dedans depuis longtemps
on dirait qu’il respire en effet il respire
à certaines heures je le sens bouger
quand je dors il rêve à ma place
il me remplace il prend ma voix
éclaire mes nuages ou les noircit
hier j’ai rêvé que je pouvais changer de peau, rajeunir
quand il s’est réveillé
je me suis réveillée sans être celle du rêve
il y a quelqu’un à l’intérieur de moi un inconnu
qui répond à mes questions
même à celles que je ne lui pose pas
et aussi à celles que je ne me pose pas
mais il ne me donne pas de vraies solutions
il me propose des options
parfois je ris et je me demande pourquoi
il y a de quoi rire?
mais après je deviens joyeuse je me demande pourquoi
si je conduis il veut conduire à ma place
il pousse mon pied sur l’accélérateur
la police m’a arrêtée (vos papier s’il vous plaît !)
J’ai dit c’est lui!
ils ne m’ont pas crue
lui c’est un cannibale
il se nourrit de ma douleur
il veut que je fabrique de la douleur
je ne l’écoute pas
mais la douleur arrive et lui il bouffe il bouffe il bouffe
jeudi il a eu un orgasme qui a duré trois minutes
il a été fantastique et un peu embarrassant
il aurait presque pu sortir de ma bouche
il me demande de l’embrasser mais je ne peux pas
il est en moi, au-dedans de moi
il porte sur lui une montre énorme
qui fait un bruit fastidieux
je crois qu’il va continuer
jusqu’à la fin – la sienne et la mienne –
avec son tic-tac tic-tac tic-tac
(trad. de l’autrice)
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Viviane Ciampi, poète franco-italienne, vit à Gênes.
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Claude Bugeia
Abîmes
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Après bien des escales, Claude Bugeia Beliaeff a trouvé une terre d’attache, la Nouvelle-Calédonie, source infinie d’inspiration poétique et d’espoir. Elle travaille à son troisième recueil après Rivages nomades paru en 2021 et Nature pacifique paru en 2022.
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Flore Iborra
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Juste ce retrait de la lumière
à peine hissée sur la façade
jaune pollen
et bleu intense
bientôt réfugiée sur les toits
résolue à se fondre
à disparaître
dans la nuit chaude de septembre
dans la douceur d’un abandon
qui gagne au loin la plage
se répand sur le souffle immense
bientôt les vagues plongeront dans l’obscur
de cet instant
nul ne parle
mon aile froissée prend le vent
humant les indices fragiles
de ce ciel d’encre qui avance
comme un amant sûr de son fait
s’avance vers son rendez-vous
chaque seconde qui bascule
me parle plus que de raison
dans le sablier tout s’inverse
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les grains noirs
charrient des lueurs.
Mon corps s’incline à la fenêtre
je veux guetter n’importe quoi
le pas des ombres
se colle à moi
m’habille de fins duvets gris
noirceur penchée sur la noirceur
mes yeux sont pâles pour la nuit
pour ce vide
sur le rivage
où des vagues remuent leur nom.
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Après avoir travaillé dans le secteur de l’audio-visuel, Flore Iborra se consacre désormais à la poésie et vit dans les Corbières, à Fontjoncouse où elle organise le festival de poésie Les Mots du Vent, créé en juin 2022 porté par l’association Livre au Vent dont elle est Présidente. Elle a reçu le prix Voix d’ici en 2019 ,le prix Amavica en 2020, le prix du Sentier des poètes en 2021, publié un livre d’artiste Eros Rhapsodie en 2015, un recueil La Boussole Mélancolique en 2022, des projets en cours.
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Pierre Rosin
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Brigitte Broc
La femme du crépuscule
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Je suis la femme du crépuscule
au corsage de nuit.
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Insaisissable, mon corps m’emporte
sur les hautes terres augurales.
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Je chevauche le vent,
roule sur la houle,
et creuse la mer pour y enfouir des lampes.
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Au profond du silence
s’abreuve la matière,
d’immenses traînées brunes
charrient leurs meutes sauvages
de pierres et de mots.
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Les graines du couchant
coulent entre mes seins,
l’arbre de la nuit
remue la solitude
et mes hanches sont deux ailes
qui recouvrent le monde.
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Je suis l’enfant de l’aube
à la tunique d’argent.
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Voix blessées des grands fonds
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Voix blessées des grands fonds,
syllabes souveraines,
d’algues en algues arc-boutées,
où gisent désormais les gorges
dont vous avez surgi ?
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Descendues au plus noir,
dans les bas-fonds sans fond
d’un abysse sépulcral,
elles reposent,
gardiennes tutélaires
d’un peuple d’épaves et de trépassés.
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De dentelles de nuit
à jamais parées,
frémissant de l’étreinte glacée,
elles consomment leurs noces de sel.
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Surannées – Eternelles.
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Voix blessées des grands fonds,
je vous entends gémir
dans le vent sur la lande,
dans la chambre d’amour,
et, dans le soir désert,
je marche à la Rencontre.
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Gilles Compagnon
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En ma vie dissoute,
autant que dissolue,
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j’aime l’abordage des failles,
leurs copieuses béances,
les étroites folies rutilantes
qui y rampent,
les lueurs à peine mansardées
des matins naissants,
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soleil tout au plus éclos,
sur la voûte des collines brumeuses
dessinant la montée
hasardeuse
de leurs peintes silhouettes…
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Je m’y engouffre sans peur
ni angoisse particulière
à m’y perdre, m’y lover,
m’y ressourcer surtout si
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j’y ai personne à observer,
à inopinément rencontrer
ou à lire
dans l’hagard
fondant et fondu
des yeux,
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comme souvent le sont
maintes âmes
en ces rares lieux-gouffres…
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J’aime la vie au large
entre ses langueurs de terre
et ses côtières rassurantes
d’amertume imaginées…
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J’aime le son fleuri du menton raclant des mers,
lèchant leur littoral rocheux
ou le sable transpercé,
transpirant au frais des plages,
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y retirant inlassablement
sa tres mince modestie…
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J’aime le langage coralien
usant ses lames de fond
comme on peut aiguiser
une faux
dans les hautes herbes
entendues
sous l’archet frisson
d’un violon
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tout en haut
d’une note aiguë
laissant béat
l’oreille avisée
concertiste,
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un soir de récital
donnant toute une pièce étonnante musicale
du grand Sergueï Prokofiev
à Pleyel !…
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En ma vie dissoute
autant que dissolue,
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j’aime le silence
parlant haut
sa parole de mime
attrapée
telle une grippe contractée,
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en leurs raclures affranchies,
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tout au fond
de ses lissées
cyniques et cruelles
abymes…
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Gilles Compagnon est né en 1951 – après un BEP de chaudronnier, il exercera de nombreux métiers dans tous les secteurs d’activité – Au collège, il est marqué par les chroniques culturelles du journaliste du Progrès, Jean-Jacques Lerrant. Plus tard, au lycée il accueille Hélène Martin, Claude Vinci, Maurice Fanon, Henri Gougaud et Marc Ogeret, en tournée dans les usines et des écoles, puis anime des émissions sur Radio Léon et Radio Canut. Publication de SOUFFLEUR DE VERS POSEUR DE PROSE chez Jacques Flament en octobre 2022.
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Sandrine Davin
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Le silence
Des cicatrices
Sur cette terre
A l’abandon
Le silence
Des étoiles
Accroché
A l’horizon
Sans lune
Le silence
Du froid
Sur le chemin
De l’exil
Et là-bas
Le bruit des os
D’entre les pierres
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Sandrine DAVIN est née le 15/12/1975 à Grenoble (France) où elle réside toujours. Elle est auteure de poésie contemporaine inspirée des haïkus et tankas, elle a publié 16 recueils de poésie dont le dernier s’intitule « Terre guerre » chez LiberEdition.
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Max Mazzoli
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La materia oscura, perché l’oscuro conta
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Sai, nella parte oscura di te,
ho scoperto quello che non siamo.
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Come se sfogliando le pagine di un libro,
le sue pagine aumentassero
invece di diminuire,
e dopo fogli pieni di parole
e altri di numeri e di formule,
trovassimo pagine solamente bianche
e poi ancora, inquietantemente,
altri fogli solamente neri e indecifrabili.
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Forse è nel buio dove tutto inizia
e dove tutto finisce.
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Là, dove nemmeno la luce interagisce.
E poi capire che siamo proprio noi
l’anomalia dell’universo,
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Che quasi tutto vive al contrario.
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Dark Matter, Dark Matters.
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You know, in the dark part of you,
I have discovered what we are not.
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As if leafing through the pages of a book,
its pages increased
instead of decreasing,
and after sheets full of words
and others of numbers and formulae,
we were to find only blank pages
and then again, disturbingly,
other sheets only in black, so indecipherable.
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Maybe it’s in the dark where it all begins
and where it all ends.
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There, where not even light interacts.
And then understanding that it’s just us
the anomaly of the universe,
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That almost everything lives the other way round.
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La Matière noire, c’est l’important
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Tu sais, dans la part d’ombre qui est en toi,
J’ai découvert ce que nous ne sommes pas.
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Comme si en feuilletant les pages d’un livre,
ses pages augmentaient
au lieu de diminuer,
et qu’après des feuilles pleines de mots
et d’autres de nombres et de formules,
on trouvait uniquement des pages blanches
et puis encore, bizarrement,
d’autres feuilles uniquement noires et indéchiffrables.
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Peut-être est-ce dans le noir que tout commence
et tout finit.
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Là où même la lumière n’interagit pas.
Et on comprend alors que nous seuls sommes
l’anomalie de l’univers,
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Que presque tout vit à l’envers.
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trad Marilyne Bertoncini
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Yin Xiaoyuan
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Yin Xiaoyuan est la fondatrice de l’École de poésie encyclopédique (fondée en 2007), membre de l’Association des écrivains de Chine, de l’Association des traducteurs de Chine et de l’Institut de poésie de Chine. Elle a publié 11 livres dont 5 recueils de poésie.
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