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La trente-neuvième nuit
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Comment s’endormir
dans cette trente-neuvième nuit
quand le cœur bat trop fort
mais pas assez fort
pour couvrir le vacarme
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des bombardiers
le hurlement sans fin
de la sirène d’alarme
les cris de frayeur
des enfants ?
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Comment s’endormir
durant la nuit sans fin
des enfants sans mères
des mères sans enfants ?
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Comment s’endormir
quand plus aucun poème
ne veut s’écrire
depuis le 7 octobre ?
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Comment s’endormir
alors que le poème tombe
sans fin dans la nuit sans fin
qui a commencé le 7 octobre ?
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Aujourd’hui il a plu
j’ai pensé très fort
aux enfants qui ont froid
au fond des tunnels sans fin.
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J’ai photographié
deux arcs-en-ciel sans fin
en pensant très fort
aux enfants enfermés.
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Nous ne dormons plus
nous nous évanouissons
de fatigue dans le noir.
Nous nous réveillons
en sursaut et en larmes.
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Nos cris de frayeur
que personne n’entend
tombent dans le poème
qui ne veut pas s’écrire
dans la nuit sans fin
du 7 octobre.
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(Sabine Huynh. Tel Aviv, nuit du 14 au 15 novembre 2023.)