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« A quoi bon des poètes en temps de détresse ? »

Hölderlin, Elégie, « Pain et vin »

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Noir, noir absolu, noir des profondeurs de la détresse, du vice, des crimes contre l’humanité, contre le vivant – NOIR : tel est le thème de la prochaine rencontre organisée par Embarquement Poétique, au Bistrot le Poète, le vendredi 19 novembre 2024, à partir de 19h.

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Est-il surprenant que la poésie ne se contente pas de fleurir la nature et s’extasier sur sa beauté? A-t-elle encore un sens quand tout s’écroule, que le gouffre est si proche qu’on en sent le souffle ?

.A quoi bon des poètes en temps de détresse?

Et si le poète, en raison de sa sensibilité – de sa folie aussi – était le plus apte – le seul à oser – affronter le mufle de la bête, arpenter les abîmes de l’âme – à vivre « une saison en enfer » ?

Si la noirceur du monde crûment (d)énoncée, exposée, par lui, à travers les mots et les images suscitées – pouvait aussi nous réveiller, nous forcer à chercher l’issue, en nous, pour le monde? Comme un électrochoc ?

Et si ce qui nous semble noir était aussi, paradoxalement, porteur de lumière, d’éveil – Lucifer, enfin, qui est l’un des noms romains de l’étoile du Berger – la planète Vénus – nommée « porteuse de lumière » car elle est premier point brillant dans le ciel, après le coucher du soleil.

Fille du Nord, je me souviens de l’éclat du charbon, l’anthracite aux bleus reflets, dont le noir collait aux mains, qu’on prenait avec la pelle pour nourrir le poêle qui ronronnait comme un énorme chat noir dont la gueule était d’autant plus rouge qu’on astiquait régulièrement la fonte de ses flancs avec du graphite aux reflets gras. Ce noir avait coûté la santé ou la vie aux mineurs, qui en portaient la couleur, un bleu-noir terni, sous la peau silicosée, asphyxiée. Ce noir avait porté douleur, avait porté malheur, mais il devenait aussi source de chaleur et de lumière – un foyer – et l’on aurait offensé le mineur – travailleur orgueilleux – en niant la valeur du trésor qu’il avait remonté du ventre de la terre, du profond ténébreux.

L’encre du poème est un reflet de ce noir : avec elle, avec ses mots, le poète explore les failles, les gouffres, les douleurs – il ne les crée pas, mais les porte au jour – à nous d’en tirer parti pour aller vers le meilleur de l’humain :  » pour refonder les fondations, y compris les fondations des Lumières et des Droits de l’homme »1c’est le sens du parcours que vous propose le prochain Embarquement Poétique.

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Des lectures, une performance, une scène ouverte pour que vous puissiez aussi dire vos textes, poèmes, chansons… (3 minutes environ, selon le temps disponible – pour lire, il est judicieux de s’inscrire avant.)

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note :

1 – Julia Kristeva, http://www.kristeva.fr/a-quoi-bon-des-poetes.html