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Marilyne Bertoncini, Nadine Travacca, Lucilla Trapazzo (Italie-Suisse), Mokhtar El Amraoui (Tunisie) , Lilli Pati (Italie)…

conte pour temps de guerre

Dans l’herbe, l’oiseau avait trouvé un morceau de miroir.
Et elle avait pensé :  « Ils ont cassé le ciel ! » –
et son cœur se brisa dans sa cage de plumes.

D’un vol elle apporta,
dans son nid de duvets,
le fragment lumineux.

Il reflétait le temps, l’orage et les nuages
et l’oiseau le couvait comme ses propres œufs.

Quand ils furent éclos, elle leur enseigna
d’aimer leur frère ciel et de faire attention
aux failles et coupures du grand ciel du dessus.

Marilyne Bertoncini

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Après l’orage

Quand cesse la tempête

au baiser d’un ciel marbré de lumière

la peine s’amollit

l’intranquille soupire

des coulures

embuent la rétine

En bordure d’une langue de brume

se tient l’horizon

qui abrite en eau douce

un trouble vagabond

Nadine Travacca

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Da qualche parte ai confini del regno  

s’intrecciano di nuovo brandelli dissonanti

traiettorie profane linee curve che stracciano

il rosso dei papaveri mentre sui cancelli

chiusi inciampa il sogno luminoso

di una sola terra

Brucia l’Europa sui balconi brucia

sbattuta contro i muri – sulle reti vite

vestiti e scogli appesi ad asciugare

e questo eterno andare e ritornare

di sibili di orrori di agonie

Pietà!

Infilo la mattina nello zaino

nel silenzio perdiamo le persone

i loro nomi urlano nell’erba

ognuno figlio di una madre orfana

Ma qui dal volo di un uccello è ancora

casa questo mondo – primavera

senza lingue senza più confini

e quanto azzurro è ancora il cielo

Portiamo tutti un sasso sulla prima vertebra

Lucilla Trapazzo

Quelque part aux confins du royaume

s’entrelacent à nouveau les lambeaux dissonants

trajectoires profanes lignes courbes qui déchirent

le rouge des coquelicots tandis qu’aux portes

closes trébuche le rêve lumineux

d’une unique terre

L’Europe brûle sur les balcons brûle

battue contre les murs – sur les réseaux vigne

vêtements et rochers suspendus pour sécher

et cet éternel aller-retour

de sifflements d’horreurs d’agonies

Pitié!

Je range le matin dans le  sac-à-dos

en silence se perdent des gens

leurs noms hurlent dans l’herbe

chacun est l’enfant d’une mère orpheline

Mais ici, à vol d’oiseau, il est toujours

notre maison ce monde – printemps

sans langues, délivré des  frontières

Et combien le ciel est bleu encore

Tous nous portons une pierre sur la première vertèbre

trad. Marilyne Bertoncini

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LA PAIX! LA PAIX! LA PAIX!

C’est de nouveau l’horrible nuit

Une si longue lourde nuit d’obus

Eteignant de ses feux crachés

Une eau réveillée à peine bue

Ce matin de nouveau le lait explose

En lèvres seins et pain ensanglantés

De rues cratères de crues engloutissant

Rêves et chairs de si chers ensevelis

Ecrasés tus tués comme tous ces chants

De printemps qu’on croyait enfin revenu

Après tant de soifs de faims de venins

Et d’interminables épines de chemins

Ce matin hélas c’est de nouveau l’affreuse nuit

Mais ce matin j’entends aussi gronder

De toutes leurs lumières entêtées

Les étoiles nécessaires possibles de la paix

Répétant de toutes ses ailes en larmes déployées

Contre toutes les armes qu’elle est pour l’humanité

La seule vraie victoire l’unique gloire

Et que la guerre avec ses mouroirs

N’apporte que trophées illusoires

Ce matin je les entends je les vois avancer

Les cœurs en radieuses ouvertes paumes

Ecarter la folle nuit et ses complaintes affolées

De leurs si doux doigts en fleurs allumées

Offrir en chœurs comme seul salvateur baume

Le si beau chant de la paix ! la paix ! la paix !

© Mokhtar El Amraoui

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Speranza

Come lacrima dal cielo mi poseró sul filo d’erba e

come fresca rugiada disseteró la mia amara terra.

Mani nude rivolteranno ancora le aride zolle, 

nella speme e nella preghiera – forse – ritroveremo

pace, amore e fratellanza, 

sperando di non veder morire ancora i verdi germogli della vita, in nome della libertà.

Lilli Pati

Espoir

Comme une larme du ciel je me poserai sur le brin d’herbe et

comme une fraîche rosée j’abreuverai ma terre amère.

De nouveau des mains nues retourneront les mottes sèches,

dans l’espoir et la prière – peut-être – retrouverons-nous

la paix, l’amour et la fraternité,

espérant ne plus voir mourir les pousses vertes encore de la vie,
au nom de la liberté.

trad. Marilyne Bertoncini