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Emotion, après les incendies de l’été qui ont si lourdement touché cette région, de lire cette ode à « La Corbière » par Flore Iborra, organisatrice du festival Les Mots du Vent dont la 3ème édition, au Château Bonnafou, m’avait permis de découvrir un paysage magnifique de vent vert dans les hauts arbres, de chants de cigales et de chaleur intense que le feu a détruits. Je vous livre l’incipit de ce magnifique livre, dont le texte est accompagné des photos de Gérard Romero.

La terre rayonnait sous la lumière instable, sourde et chaude dans la force de ses ocres,

de ses cailloux brûlants, dans l’épaisseur dorée des vignes.

« La Corbière

et non les Corbières »

disait-il près de son tracteur,

ou en versant un rouge épais

dans des verres à peine rincés.

Rouge aussi était sa chemise –

un jeune homme vivait là-dedans

mais les saisons avaient passé,

traversant tout

jusqu’au brouillard

de ce pas souple des nuages

 balayant simplement le ciel,

les saisons s’étaient arrêtées,

elles avaient marché sur leurs corps,

abandonnant les cris de joie

des étoiles posées sur la nuit,

dépliant

trop de plis amers

sur leurs visages d’enfants surpris,

journées luisantes

au souffle court,

 journées emportées au galop

dans les froides prairies d’hiver,

traces d’un jeu incertain,

déchiffré en lettres sensibles,

l’alphabet pulsé par le sang,

a su un jour

que la Corbière,

la sienne,

et peut-être la seule,

retenait l’ocre,

le vert,

dévoilait peu,

gardait secret

le minéral de sa force

malgré l’évidence de la vigne,

le vol affiché d’une buse décrivant de grands cercles

surveillant à grands traits le calcaire,

même par ces jours tendus de vent

pareils à la source et

l’épée

du fil coupant de la bourrasque (…)

L’autrice :

Flore Iborra

Après avoir vécu et travaillé à Paris et à Toulouse, Flore Iborra signe avec Idylles de la Corbière un recueil en hommage à sa terre d’élection, les Corbières en terre d’Aude. Lectrice passionnée, elle retrouve dans ce paysage intense, certaines similitudes avec les descriptions de Jean Giono ou d’Henri Bosco de la Provence et du Lubéron. Parenté des terres rouges, emmêlées de broussailles, » longs corridors », où « s’agitent des vies farouches ».

Elle a créé et anime le festival de poésie «Les Mots du Vent », qui propose chaque été au public, une rencontre avec les poètes, éditeurs, artistes dans un partage de toutes les formes poétiques.